Bio, nature, terra vitis, biodynamie, nombreux sont les labels apparus sur les étiquettes de nos bouteilles depuis quelques années. Tout le monde comprend bien qu'il s'agit d'une promesse pour un vin plus naturel ! Mais que recouvre exactement chacun de ces labels ?
Notre demande de vin bio a littéralement explosé en 2020. Elle avait déjà quadruplé entre 2010 et 2019. Hors grande distribution, elle a dépassé le cinquième des achats en 2020, tous labels confondus.
Une intensification qui fera très probablement de notre pays, dès 2021, le premier consommateur de vins bio au monde. Il va donc falloir produire bio et le plus rapidement possible. Bientôt le choix n'existera plus. Il faudra être bio ou "très fort" pour rester en "conventionnel".
Les vignerons français l'ont bien compris. 12% du vignoble est déjà bio mais les surfaces en conversion sont en très nette progression
avec des pourcentages frôlant les 65% en Languedoc ou à Bordeaux.
Observons donc ces labels ....avec la promesse d' être optimiste et peu " complotiste".
Pour un vigneron qui souhaite se lancer, 2 possibilités :
La viticulture raisonnée (Label Terra Vitis - niveau HVE II) se propose de ne traiter la vigne que lorsque cela est nécessaire et d’assurer une transparence totale de ces traitements. Bon départ mais qui ne nous garantit pas un vin exempt de chimie (avec des grandes variétés possibles selon les domaines et selon les millésimes) et des pratiques en vinification respectueuses du raisin.
Second accessit avec le label HVE III, niveau le plus élevé pour Haute Valeur environnementale. Une certification qui a eu la drôle d'idée de prévoir 2 voies pour le moins très inégales.
La voie A requiert de satisfaire à une série de critères concernant des enjeux de biodiversité, d'utilisation de produits phytosanitaires, de fertilisation de sols et d'irrigation. Mais dans le barème actuel, le producteur n'a besoin d'atteindre que 40% du maximum des points attribuables pour valider l'ensemble. Relevons l'effort cependant !
La voie B se contente de 2 indicateurs : la surface des structures agroécologiques (bandes enherbées, haies,.....) doit représenter plus de 10% de la surface agricole utilisable et le pourcentage du CA consacré aux achats d'intrants (pesticides, herbicides, produits de vinification,....) doit être inférieur à 30% du CA global. (Le Rouge & Le Blanc - 1er trim. 2021). Facile, non ?
Et le Ministère de l'Agriculture de refuser de communiquer la proportion de certifiés A et B. Ne souhaiterait-on pas faciliter l'accès au marché "aux gros faiseurs" ?
Parlons maintenant du label le plus connu et le plus répandu, le label bio européen, reconnaissable par sa feuille posée sur fond vert.
Jusqu’en février 2012, un « vin bio » garantissait que les raisins étaient en agriculture biologique, donc bannissaient pesticides, herbicides, engrais chimiques et OGM. Avec l'arrivée du label bio européen, le raisin doit non seulement être bio mais la vinification suivre des règles de vinification plus « propre ». Les "bio-canal historique", ont crié au scandale à l'époque, déplorant un nivellement par le bas. Pourtant le fait de s'intéresser, au delà du raisin, aux pratiques de vinification fut une réelle avancée. Récolter un raisin bio pour le "matraquer" ensuite, par des pratiques peu vertueuses en vinification, n'a en effet aucun sens.
Beaucoup de vignerons "bio" de la première heure sont passés en biodynamie,
système de production inspiré par l’anthroposophie et par son maître à penser , Rudolf Steiner (philosophe et agronome autrichien - 1924).
Je ne reviendrai pas ici sur les polémiques qu'engendrent nécessairement sa théorie. Il est évident que certains rapprochements sont discutables. Je retiendrai plutôt le "bon sens paysan" qui nous dit : "Ecoutez, je ne saurais vous expliquer totalement, scientifiquement, pourquoi ça marche, mais à l'évidence, les résultats sont là !"
La vigne est ici considérée comme un organisme vivant. Le sol cultivé n'est pas un simple support pour la vigne mais bien un milieu de vie, source d'énergie pour la plante. Les échanges entre la biologie du sol, son système racinaire et foliaire permettent l'expression du terroir dans les raisins.
Le vigneron s'appuie sur un calendrier lunaire (Maria Thun - 1952) qui définit les travaux et les traitements de la vigne, et sur un ensemble de préparas ayant pour vocation d'aider la plante à pousser harmonieusement
L'esprit est aussi d'apprendre à la plante à créer ses propres anticorps. Ces préparas, tous d'origine naturelle, font appel à nombre de plantes (ortie, prêle, achillée, camomille, valériane,....) bien connues des "pros" du jardin.
La biodynamie garantit aussi l'interdiction de certaines pratiques, considérées somme susceptibles d'annihiler l'expression du terroir dans le vin.
Moins de cuivre, utilisation de levures de vinification et/ou aromatiques interdites si elles ne sont pas propres au domaine. Morceaux de Chêne, produits correcteurs en vinification et traitements" barbares" comme la thermovinification sont exclus.
Surtout les biodynamistes considèrent que les quantités admises de sulfites ajoutés dans les vins " bio" ne sont pas assez contraignantes.
A titre d'exemple, un vin en biodynamie ( label Demeter ou Biodyvin) offre une diminution de moitié des doses de sulfites ajoutées pour un vin rouge contre un tiers en bio.
En réalité, les niveaux sont souvent encore plus bas.
Reste enfin la toute jeune charte des vins "Méthode Nature", qui en plus des pratiques du label bio, bannit l'ajout de sulfites et le recours à des levures extérieures au domaine. Tout ce qui est de nature à modifier, "brutaliser" ou "traumatiser" le raisin en vinification est de nouveau exclu.
Gare cependant à bien sélectionner l'origine de vos vins natures. L'absence d'ajout de sulfites protecteurs, laissant la porte ouverte à de possibles dérives aromatiques déroutantes (odeur d'écurie, de pommes blettes,..).
A vous de faire votre propre sélection. La bonne nouvelle est que blanc, rosé ou rouge, le vin est en train de "se verdir" rapidement.